Pros Vendredi 03 Nov. 2017 à 09h52

Roland Romeyer: «Le derby, un match d’hommes» 

Avant le derby, le Président de l'AS Saint-Etienne évoque le début de saison, la stratégie du club et cette rencontre si particulière attendue par tous les supporters.
Comme jugez-vous les résultats de l’équipe ?
Nous comptons 18 points, soit un de plus que la saison dernière. Nous sommes donc dans nos temps de passage habituels alors que nous vivons une phase de transition. L’effectif a été totalement modifié. Nous avons enregistré 14 départs et 7 arrivées. Ce sont des choix réfléchis. Après un long cycle de développement, marqué par quatre participations consécutives à l’Europa League, plusieurs places dans le Top 5 de la Ligue 1 et une Coupe de la Ligue, Bernard Caïazzo et moi-même avons ressenti la nécessité de faire évoluer notre stratégie. L’ASSE a construit un projet avec une nouvelle organisation sportive, pilotée par Dominique Rocheteau.  Nous avons pris cette décision car nos bases sont solides : l’ASSE est 4e à l’indice UEFA et présente pour la septième saison consécutive un résultat financier bénéficiaire. Mais la mise en place d’un nouveau projet sportif demande du temps, surtout avec un changement de staff et un bouleversement de l’effectif. Les résultats et la qualité du jeu ne peuvent pas s’obtenir en un claquement de doigts. N’oublions pas que nos concurrents ne cessent de se renforcer et bénéficient, pour certains, de l’apport de capitaux étrangers. Et puis, ces dernières semaines, nous avons subi les blessures de joueurs importants. Mais, même si nous pouvons regretter certains points perdus, notamment à domicile, je suis confiant compte tenu de ce que je vois chaque jour au centre d’entraînement. Le travail paie toujours. 
 
Le recrutement est-il conforme à vos attentes ?
Nous ne pouvons pas juger les recrues après trois mois de compétition. J’ai toujours en tête les difficultés rencontrées par Pierre-Emerick Aubameyang et Max-Alain Gradel lors de leur arrivée au club.  A l’époque, j’en connais beaucoup qui s’étaient interrogés. Regardez ce que ces deux joueurs sont devenus et surtout ce qu’ils ont apporté au club. Nos recrues ont besoin de temps. Je tiens également à souligner l’important travail réalisé par notre cellule de recrutement pour permettre le départ de 14 joueurs.  Oscar Garcia nous a demandé de travailler avec un effectif réduit compte tenu du fait que l’ASSE ne joue pas de Coupe d’Europe cette saison. La cellule de recrutement a aussi répondu à cette exigence de notre nouvel entraîneur.
 
Comment l’ASSE peut-elle rester compétitive face à une concurrence plus relevée ?
Quand nous avons repris les rênes du club avec Bernard Caïazzo, en 2004, l’ASSE venait de passer plus de temps en Ligue 2 qu’en Ligue 1 lors des dix années précédentes. Nous avons stabilisé le club en Ligue 1 tout en le développant. L’ASSE est 4e au classement cumulé des cinq dernières saisons en Ligue 1 derrière le PSG ; Monaco, et l’OL alors que nous n’avons que le 8e budget de L1.  Aujourd’hui, il y a deux leviers pour améliorer la compétitive d’un club : l’exploitation du stade et l’apport de capitaux. Pour l’instant, l’ASSE subit le handicap de ne pas gérer son stade contrairement à certains de ses concurrents car nous sommes locataires de Geoffroy-Guichard seulement le temps du match. Des discussions ont été engagées avec Saint-Etienne Métropole pour remédier à cet handicap. Accueillir un nouvel investisseur constitue un autre objectif. Nous avons mandaté la Banque Lazard pour rechercher des investisseurs. Après avoir passé l’été à préparer, avec des experts financiers et juridiques, un dossier complet de présentation, la Banque Lazard va maintenant auditionner les candidats. Nous espérons aboutir dans les prochains mois. 
 
Quelques anciens joueurs du club ont récemment émis des critiques. Que répondez-vous ?
Je reçois aussi beaucoup de messages d’encouragement de grands anciens comme Ivan Curkovic, Aimé Jacquet ou Rachid Mekloufi. Eux ont été des leaders sur le terrain puis sont devenus dirigeants. Ils connaissent la difficulté de manager une institution comme l’ASSE. Ils font preuve d’une grande humilité. On ne peut pas comparer les époques. Le football des années 60 et 70, celui qui m’a fait vibrer comme supporter, ne peut être comparé au football d’aujourd’hui. Tout a changé : le jeu et l’économie du football.  Dominique Rocheteau est le premier à le dire. Les clubs, qui étaient des associations dans les années 70, sont devenus des sociétés qu’il faut pérenniser sur le plan économique. Depuis 2010, l’ASSE a trouvé une stabilité financière et sportive qui lui a permis de remporter un trophée et de participer quatre fois de suite à l’Europe League. Lors des cinq dernières saisons, seulement cinq clubs ont remporté un trophée sur les quinze mis en jeu : le PSG, Monaco, Bordeaux, Guingamp et l’ASSE. Ceux qui critiquent ont-ils ou savent-ils gérer une entreprise ? Ivan Curkovic a été dirigeant de grandes sociétés, d’une fédération et d’un club qui compte dans son pays. J’écoute toujours ce qu’il me dit, comme j’écoute Aimé Jacquet. Nous sommes l’un des rares clubs en France à valoriser nos anciens joueurs. L’ASSE n’est-il pas le seul club à posséder un musée ? Les anciens sont des exemples, des références. La parole de quelques anciens, un peu aigris, ne reflète pas le sentiment général.
 
Vous avez souhaité renforcer votre politique de formation. Pourquoi ?
C’est une nécessité. L’ASSE doit être capable de former une partie de l’ossature de l’équipe professionnelle. Le centre de formation a pris un nouvel élan sous l’impulsion de Julien Sablé, notre nouveau directeur, et des anciens joueurs dont l’expérience et l’exemplarité contribuent à la progression de nos jeunes. La réserve dirigée par Laurent Batlles est en tête de son championnat comme l’équipe U17 qui vient de remporter le derby. Plusieurs joueurs sont régulièrement retenus dans les différentes équipes de France de jeunes. Une dynamique s’est créée. Il est aussi important de pouvoir dire aux parents des jeunes qui nous rejoignent que leurs enfants pourront faire carrière chez nous.
 
Comment imaginez-vous ce 115e derby ?
Je suis déjà heureux que ce match puisse se dérouler avec les supporters des deux camps. Les supporters lyonnais seront même plus nombreux que la saison dernière. Le derby est un match unique dans lequel on retrouve tous les ingrédients d’un football populaire. C’est une belle vitrine pour la Ligue 1. Je souhaite que ce derby soit une grande fête sans violence ni haine. Avec un budget plus de trois fois supérieur, l’OL nous a longtemps dominés mais nous avons su inverser la tendance depuis quelques saisons.  Ce dimanche, nous serons à guichets fermés.  L’OL part naturellement favori avec sa puissance financière. Nous devrons livrer un grand match d’hommes. Les derniers derbys à Geoffroy-Guichard, nous les avons gagnés avec un état d’esprit, des valeurs de combativité et de courage qu’il faudra encore faire valoir ce dimanche.

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