1964 : Le goût de la victoire

Après un an de purgatoire à l’étage inférieur, l’ASSE, revigorée par le retourde Jean Snella sur le banc, décroche le deuxième titre de son histoire.

À la mi-temps du match contre le RC Strasbourg lors de la 34e journée, le dimanche 7 juin, Saint-Étienne est mené 2-0 à la surprise générale, mais le public stéphanois honore malgré tout son équipe qui vient d’enlever officiellement le titre de champion de France, le deuxième de son histoire. Les jeunes du club offrent des fleurs aux joueurs, ainsi qu’à leur entraîneur. Une délicate attention qui remettra le groupe dans le droit chemin, avec un score de parité (2-2), scellé à la dernière minute par un but d’André Guy salué par les 14 000 spectateurs présents. Après la rencontre, un vin d’honneur est servi au stade, où se déroule une courte cérémonie à la mémoire du fondateur de celui-ci, Geoffroy Guichard. Puis, dans des voitures découvertes, les joueurs se rendent en cortège jusqu’à l’hôtel de ville où les attend une réception officielle.

Dans la foulée, une dizaine de jours plus tard, Mekhloufi, Herbin, Ferrier et Guy renouvellent leur contrat, signe que tous les feux sont au vert chez les Verts.

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Tout avait commencé, le 1er septembre 1963, par le retour de Jean Snella à Saint-Étienne, orchestré par Roger Rocher, tout heureux de cette « prise de guerre » à laquelle il tenait tant. Quatre ans d’exil pour celui qui avait conduit l’ASSE à son premier titre de champion de France en 1957 ! Mais depuis Genève, où il entraînait le Servette, il s’était toujours tenu au courant de ce qui se passait dans un club qu’il n’oubliait pas.

Les Stéphanois, qui avaient retrouvé le goût de la victoire en Division 2, s’attaquent avec appétit au Championnat 1963-1964, connaissent une extraordinaire série de vingt matchs avec trois seules défaites et débouchent en tête au terme de la phase aller avec le titre honorifique de champions d’automne. Au passage, ils signent des scores épiques, comme ce spectaculaire 5-4 obtenu à Lyon, ce retentissant 6-1 contre Nantes ou encore cet incroyable 7-1 contre Toulouse. Si la machine se dérègle quelque peu au sortir de l’hiver avec cinq défaites, dont une à domicile face au Stade Français (1-0), elle ne se grippe pas pour autant. Monaco n’est certes pas loin de conserver son titre de champion, mais le départ de Lucien Leduc a créé, en son sein, un certain effritement moral. L’équipe de la Principauté termine à un souffle (trois points d’écart) et doit s’incliner devant plus fort qu’elle, de même que le RC Lens, calé en troisième position.

La réputation d'équipe à paradoxes

Rachid Mekhloufi, de retour d’exil après son départ soudain en avril 1958, tient un rôle essentiel dans la conquête du titre. Seul Stéphanoisà avoir joué les 34 matchs de Championnat, il inscrit 16 buts, dont deux penalties.Surtout, en qualité de meneur de jeu, c’est lui qui tire les ficelles sur le terrain, notamment dans la surface de réparation adverse où il distribue la dernière passe idéale à ses coéquipiers, au millimètre et à toute vitesse. Il représente, pour le titre 1964, ce que Kees Rijvers a symbolisé pour le sacre de 1957 : un maître penseur.

Mais Mekhloufi n’est pas le seul à porter son équipe vers la conquête. Robert Herbin s’est affirmé, André Guy a « lâché les chevaux » avec ses 28 buts – devenant le deuxième meilleur buteur, derrière le Lensois Ahmed Oudjani –, Jacques Foix a pris la relève avec le brassard de capitaine après la grave blessure de René Domingo, Pierre Bernard a réussi des arrêts qui ont forcé la victoire, Richard Tylinski est redevenu lui-même après un long passage à vide…Pour un club promu, le résultat est exceptionnel. Il confirme la réputation de l’ASSE d’équipe à paradoxes. Vainqueur de la Coupe de France 1962 l’année même où elle descendait en Division 2, l’AS Saint-Étienne enchaîne avec un titre de champion de D2 (1963) et un titre de champion de D1 (1964). Une sacrée trajectoire qui marque aussi le début d’une domination sur le football français.

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