Anciens Verts Anciens Verts Mardi 13 Déc. 2022 à 15h20

Christian Lopez : "La France est favorite"

Quatre titres de champion au France au compteur, trois coupes nationales, une finale continentale mémorable à Glasgow et un non moins légendaire et salvateur tacle face au tsar du Dynamo Kiev, dOleg Blokhine, Ballon d'Or rien que ça : le palmarès XXL de Christian Lopez chez les Verts et la trace indélébile qu'il a laissée à l'ASSE en font un joueur majeur de l'épopée stéphanoise des années 70-80.

Des performances exceptionnelles qui lui ont valu tout naturellement d'être appelé chez les Bleus à 39 reprises, Bleus avec lesquels il a pris part aux Coupes du monde 1978 en Argentine et 1982 en Espagne. Retiré depuis quelques vingt-cinq ans sur la Côte d'Azur, au Cannet-Rocheville, le libero de la grande époque des Verts nous fait part de ses souvenirs en Bleu.


Christian, quel souvenir gardez-vous de votre première cape en 1975 face à la Hongrie (2-0) ?

Stefan Kovacs ayant légitimement renouvelé sa confiance à la "garde noire", Trésor - Adams, j'ai connu mon baptême du feu au poste de latéral droit. Ce n'était pas mon poste de prédilection. Chez les Verts, j'évoluais dans l'axe, tant au poste de stoppeur que celui de libero. Ceci étant, cela s'est plutôt bien passé. J'ai  fait mon match. En revanche, je me souviens l'avoir fini avec les fesses rougies ! Quelques jours auparavant, le Parc des Princes avait accueilli un match de rugby. Le terrain était gras et ils l'avaient sablé. Lorsque tu taclais, tu t'arrachais tout ...


Et de votre premier capitanat ?

Je l'ai vécu à Paris en 1977 face à l'Allemagne emmenée par mon idole, Franz Beckenbauer. J'étais, vous l'imaginez, extrêmement fier, moi le pied noir qui avec mes parents avait quitté l'Algérie en 1962. Ce qui est dingue, c'est que je n'étais pas prêt, pas préparé. J'avais rallié la capitale en avion dans l'urgence après avoir fêté le baptême de mes deux filles. C'est à mon arrivée que Michel Hidalgo m'a annoncé la nouvelle : j'allais pour la première fois porter le brassard de capitaine. J'ai donné le meilleur de moi-même. J'avais conscience de la responsabilité qui m'incombait, de l'honneur qui m'était fait. À Sainté, avec les Mitoraj, Bereta, Durkovic, Curkovic et autres Farison, j'avais été élevé à la dure, avait été à bonne école en termes de valeurs, de respect et de rigueur. J'ai toujours été convaincu que les six jeunes lancés alors dans le grand bain ont progressé plus vite, précisément grâce à ce cadre-là.  Nous l'avions emporté sur un but d'Olivier Rouyer (1-0).


"Écarté après un revers face à l'Angleterre"

 

Votre plus forte émotion en Bleu ?

Ce premier capitanat bien évidemment mais également les deux phases finales de Coupe du monde que j'ai disputées en 1978 en Argentine, bien que je n'étais pas titulaire en la présence de Patrice Rio et en 1982 en Espagne.


Votre plus grande désillusion en Équipe de France ?

En Espagne, j'ai disputé le premier match face à l'Angleterre que nous avons perdu (3-1). Dans la foulée, six ou sept joueurs dont je faisais partie n'ont pas débuté le match contre la Tchécoslovaquie (1-1). Et pourtant, bien des années plus tard, j'ai revu les images et n'ai pas eu le sentiment que ma responsabilité était engagée sur les buts que nous avions encaissés. Et puis Gérard Janvion faisait le taf dans l'axe. Dès lors, il était compliqué de le suppléer. J'ai connu en Espagne ma dernière sélection. Paradoxalement d'ailleurs dans la mesure où, parti à Toulouse, j'y ai sans doute réalisé la plus belle saison de ma carrière.


Votre but, inscrit avec l'Équipe de France et un maillot ... vert ?

C'est le fameux épisode des maillots en Argentine en 1978. Nous avons joué avec le maillot d'un club de pêcheurs... C'est incroyable mais ce maillot ressemblait étrangement à  celui de mes débuts à Rocheville : blanc avec des bandes vertes en effet. J'ai ouvert le score sur une frappe d'une trentaine de mètres qui est allée se ficher dans la lucarne du portier magyar (3-1). Dominique Rocheteau avait également marqué.


"Platini : un régal; Trésor : un monument"


Les partenaires qui vous ont impressionné tant chez les Verts que chez les Bleus ?

Tant de joueurs de grand talent ont porté le maillot stéphanois qu'il est difficile d'en ressortir un : d'Ivan (Curkovic) à Salif (Keita) ou Oswaldo (Piazza) pour ne citer qu'eux.. Je dirais toutefois Michel Platini même s'il ne fallait pas lui demander de défendre ! Ouvertures lumineuses, qualité de frappe, adresse devant le but, faculté à jouer juste, sans parler de ses coups-francs : il savait tout faire. Et tout bien faire. Un régal. Idem pour Jean-Michel (Larqué). Lorsque nous étions dans la m..., on lui refilait la patate chaude et il en faisait le meilleur usage, trouvait la solution et rendait notre jeu fluide et efficace. En sélection nationale, Marius Trésor m'a impressionné par son calme, sa sérénité, sa lecture du jeu. Un monument. La charnière, constituée de Maxime Bossis et de Patrick Battiston, des latéraux de formation, m'impressionnait également.


"Gare aux fautes stupides"


Vous avez connu, pour l'essentiel de votre carrière, Robert Herbin en tant qu'entraineur de l'AS Saint-Étienne et Michel Hidalgo en qualité de sélectionneur chez les Bleus. Peut-on établir un parallèle entre ces deux grands techniciens ?

Non. Ils étaient totalement différents. Roby ne parlait pas beaucoup. Il avait des relais privilégiés sur le terrain auxquels il transmettait des messages. "Curko" bien sûr mais aussi Oswaldo Piazza, Jean-Michel Larqué, Georges Bereta ou Hervé Revelli. Ivan était le relais parfait tant il en imposait par ses qualités, sa personnalité et son professionnalisme. Je lui ai souvent dit : "si j'ai fait cette carrière, je te la dois en grande partie". Si Roby était plutôt introverti, Michel Hidalgo était plus dans l'empathie. Il avait une gestion de bon père de famille.


Avec Marius Trésor, vous avez constitué une charnière d'exception. Que pensez-vous des défenseurs centraux présents au Qatar ?

Les axiaux font partie de cette colonne vertébrale, du gardien à l'attaquant de pointe en passant par le meneur de jeu, sans laquelle vous ne pouvez nourrir aucune ambition. Si vous entendez faire des  résultats, il vous faut être solides défensivement, rigoureux, intraitables dans les duels. Aujourd'hui, au sein de cette ligne défensive, il y a incontestablement de la qualité. Un bémol cependant : trop de fautes inutiles sont commises. Elles auraient pu pénaliser les Bleus face à l'Angleterre. Il faut savoir canaliser son énergie sous peine de s'exposer à des coups de pied arrêtés dangereux, à des cartons.


Votre pronostic pour France - Maroc ?

Je souhaite bien évidemment et je le crois fermement que les Bleus vont franchir cet ultime obstacle sur la route de la finale. Les Marocains m'ont bluffé par leur rigueur tactique, la qualité de leur organisation en bloc bas. On les savait talentueux. Ils ont désormais passé un cap en termes de discipline, de déplacements, de compensations. Ceci étant, Aguerd et Saïss pourraient être forfait. Si tel est le cas, le Maroc perdrait gros. Et puis, ils ont beaucoup donné. Ne s'économisant pas, ils ont fini sur les rotules face au Portugal (1-0). Ils peuvent le payer physiquement. La France, savant cocktail d'expérience et de jeunesse et possédant en Kylian Mbappé ce fameux facteur X capable à tout moment de vous faire gagner un match, va passer et, dans la foulée, se succéder à elle-même.

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