Jessy Moulin, l'enfant des Tourrettes
L’actuel gardien des Verts avait 13 ans lorsqu’il a quitté sa famille et Les Tourrettes, dans la Drôme, pour vivre pleinement sa passion. Son parcours est celui d’un homme authentique profondément attaché à sa famille.
Gaillard et sensible tout à la fois, Jessy Moulin est un affectif. "La famille, chez nous, n’est pas un vain mot. La quitter, à 13 ans, afin de vivre mon rêve de gosse, n’a pas été chose aisée." Des Tourrettes à Saint-Étienne, sa trajectoire décrit l’itinéraire d’un enfant attachant. "Nous sommes une famille très unie. Elle est tout pour moi. Je n’ai pas honte de l’avouer : la quitter pour rejoindre l’ASSE a été un vrai déchirement. J’étais partagé. Je me posais des tas de questions. Je souhaitais saisir l’opportunité qui m’était offerte mais, en même temps, je n’avais
pas envie de quitter mes parents
et mes trois frères. C’était notre
sujet de discussion. Je savais
que je pouvais compter sur leur soutien.
Mais je n’avais que 13 ans. Moralement, c’était très dur. Je
ne suis pas allé à l’école pendant
deux semaines. Et puis un jour,
Nicolas Bertrand, le frère de mon meilleur pote, Romuald, est venu à la maison. Il m’a secoué. Je me souviens encore de ses mots : nous voudrions tous être à ta place, réalise ton rêve!"
"Il en demandait toujours plus. Trois séances hebdomadaires, durant l’été, ne le rebutaient pas. Un gosse extra. (Jean-Yves Brucker, son éducateur en U13)
Vingt ans plus tard, Jessy Moulin est toujours Stéphanois et mesure, au quotidien, la chance qui est la sienne de vivre de sa passion. "Croyez-moi, cela vaut le coup de faire des concessions." Celles que demain Lorenzo, le fils de Nicolas, nouveau pensionnaire à L’Étrat, sera amené à consentir. "Voici deux semaines, je l’ai accueilli à la maison. Je sais trop ce que c’est d’être éloigné des siens !"
Généreux dans la vie, le minot des Tourrettes l’a toujours été également sur le terrain. "J’ai débuté à 6-7 ans. Je jouais attaquant. Et puis, lors d’un tournoi à Rochemaure, je suis passé dans les cages. Immédiatement, cela m’a plu. Voir le jeu, aller au duel, plonger, sortir loin de sa surface : j’ai accroché tout de suite. Gardien, c’est un poste à part. Lorsque tu encaisses un but, tu ressens de la culpabilité et tu dois apprendre à gérer les regards de tes partenaires. Mais cela participe aussi au charme du poste. Il faut savoir ne pas fuir ses responsabilités", confie le portier de l’ASSE.
Pour y arriver, il faut bosser. Encore et toujours. "Il en demandait toujours plus. Trois séances hebdomadaires, durant l’été, ne le rebutaient pas. Un gosse extra. Jamais un mot plus haut que l’autre. Il nous a sorti des matches extraordinaires. Combien de fois, il nous a sauvé la mise lors des séances de tirs au but ! Et puis, il n’avait pas peur, n’éprouvait aucune appréhension à se jeter dans les pieds des attaquants. Seul petit bémol : ses dégagements au poing, il boxait les ballons alors que j’avais le sentiment qu’il pouvait les capter", se souvient son éducateur en U13, le Ligérien Jean-Yves Brucker, vice-champion de France FSCF en 1973 avec Saint-Joseph.
Depuis, Jessy a énormément progressé. Et fait montre d’une loyauté et d’une fidélité à son club tout simplement exemplaires. Question d’éducation, sans doute. "Je sais d’où je viens. Jamais, je ne l’oublierai. C’est une chance d’être unis de la sorte. On partage plein de choses : la passion des sports mécaniques par exemple." Véhiculée de génération en génération. Un vrai moteur. Une belle histoire de moulins qui tournent comme des horloges suisses.